Les joies de la copropriété



Nous le savons tous, vivre en appartement nous fait vite réaliser que l’on n’est pas seul au monde. Ainsi, avoir des voisins au dessus, en dessous, à sa droite et à sa gauche,  implique nécessairement de faire des concessions. Le problème en Israël (prenez l’exemple de la politique), c’est que les concessions sont toujours lourdes de conséquences…

Grave erreur que d'avoir choisi un "dirat gan", entendez par là un charmant petit rez-de jardin qui permettait de profiter de quelques mètres carrés de verdure dans un quartier pourtant « coté » de la ville, le fameux quartier Sha’hamon que les Français connaissent bien (ne me dites pas le contraire). Ce quartier porte le nom de la rivière qui a quitté son lit depuis longtemps (y a-t-elle un jour dormi ?), mais qui est loin d’être un long fleuve tranquille...
 Car si vivre dans « les fruits »* donne la banane et la pêche à longueur de journée, sachez que, côté immeubles, c’est plutôt « la shrouna » !

En choisissant le rez-de jardin, j'avais donc oublié que trois étages le surplombaient et que mes quelques mètres carrés de pelouse et d’eau chlorée allaient devenir le pôle d’attraction de tous les curieux sur leurs terrasses.

Passé les premiers jours d'un calme trompeur (le fameux calme avant la tempête), c'est un joyeux vacarme qui est venu troubler notre quiétude et remplir notre quotidien de décibels dépassant, de loin, le mur du son !

Tout a commencé par une soirée Shesh besh bien arrosée chez le voisin du dessus, qui s’est achevée quelques litres de vodka plus tard aux petites heures du matin, plus exactement à une heure trente de la sonnerie du réveil…
Quelques jours plus tard, ce même voisin décidément très hospitalier organisait une soirée "Al aèsh" (barbecue). Ce jour là, j’ai dit adieu à ma nappe antitaches en synthétique qui aurait dû penser à être « anti-feu », mon voisin ayant eu l’idée lumineuse de jouer du séchoir à cheveux pour attiser ses braises…Quelques minutes plus tard, il venait, confus, sonner à ma porte, non pas pour s’excuser, mais pour récupérer une entrecôte venue tout droit, loi de la pesanteur aidant, se suicider sur mon carrelage…

Et le shabbat, alors que j'osais espérer une trêve bien légitime, une pluie d'épluchures de pépites (Ne vous ai-je pas dit que mes voisins étaient Israéliens?) vient se planter dans ma pelouse, achevant de ruiner mon petit coin de verdure décidément mis à rude épreuve.

Je devrais vous parler aussi des journées nettoyage de terrasse (heureusement, elles ne sont "qu'" hebdomadaires) où un nuage de poussière vient recouvrir la mienne. Des journées lavage de printemps où un torrent d’eau sale vient noyer mon linge étendu au soleil et sec depuis longtemps mais qui n'attendait plus que la fin d'un excès de flemme pour être ramassé. Du jour où  l'explosion de la canalisation de la salle de bain a laissé un souvenir impérissable (et surtout indélébile) à mon plafond.
Je devrais aussi vous parler des objets récupérés au fil du temps tels que billes, balles, ballons (heureusement qu'ils ne jouent pas au bowling ni aux boules, me direz-vous!), torchons, fourchettes et serviettes usagées…des journaux que le vent  fait envoler sans prendre soin de vérifier que leur date est dépassée (pourquoi ne reçois-je jamais l'édition du jour?).
Mais tout cela risque de faire de la peine à mon propriétaire ou pire, lui donner l’envie de vendre sans préavis. Cela risque aussi de chagriner les agents immobiliers qui n’apprécieraient pas que le quartier soit boycotté…

C’est pourquoi je ne dirai rien. Promis.
Mais…Ne dites pas que je ne vous l’ai pas dit !

Valérie Bitton

  *Pour les non-initiés, je veux parler des Peirot, le quartier où chaque rue porte le nom d’un fruit.

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